vendredi 12 août 2022
mercredi 15 décembre 2021
œ(il/uf)
La série des déplacements métonymiques, dans l’Histoire de l’œil, a pour fonction de montrer que le désiré n’est jamais ceci ou cela, mais toujours à côté de ceci, à côté de cela. Le regard amoureux, l’œil de l’amante, ne se chargent de sens, de signification érotique, que pour autant qu’ils sont immédiatement déplacés vers autre chose (« différés ») ; d’où la série des déplacements et des médiations : de l’œil on passe à l’œuf, puis à l’anus, puis au testicule, puis à la vulve, où Simone introduit, à la fin du roman, l’œil qu’on vient d’arracher à un prêtre ; c’est alors, contemplant le sexe de Simone qui entoure l’œil du prêtre, que le héros revoit soudain le regard de Marcelle, son amante. À travers ses différentes pérégrinations, le sens érotique est revenu à l’objet qui lui a servi de point de départ ; mais entre-temps il a circulé, et n’aurait pas eu lieu s’il n’avait ainsi circulé : car la signification érotique n’est pas sise en l’œil de l’amante, mais dans le chemin qui le conduit à l’œil énucléé d’un homme, glissé dans la vulve d’une autre femme. Comme le dit Michel Sardou en son langage : « Elle court, elle court, la maladie d’amour. » Tel en tout cas court le sens. Il y a un cycle du sens, un flux, un courant ; le sens n’est ni ici ni là, le sens est ce qui « passe », et c’est se condamner à le manquer que de prétendre l’arrêter pour s’en saisir.
Clément Rosset
Le Réel. Traité de l’idiotie
Éd. de Minuit, 1977, p. 56-57
lundi 19 avril 2021
R. R. [x 2]
• Europe, n° 714, octobre 1988, 224 p. [75 F]
La liste des médications, tenue à jour par Charlotte Dufrène (« mon amie » comme dit le dernier manifeste), est, des œuvres de Roussel, une des mieux abouties : Phanodorme, Hypalène, Vériane, Rutonal, Sonéryl, Somnothyril, Neurinase, Acetile Veronidin.
Elle suit encore, après abandon de l’écriture visible, le cours de la « création imprévue due à des combinaisons phoniques ». Les commentaires aussi laissent croire à l’efficace du nom et de la chose : sommeil euphorie extra, euphorie très grande euphorie euphorie toute la journée sommeil bon sommeil formidable euphorie euphorie désordonnée.
On commence mal une biographie par sa fin, sauf dans le cas, prédicable ici, où l’on ne sait rien… sinon ce qu’implique ce rapport du docteur Pierre Janet : « Sa vie était construite comme ses livres. »
« Raymond Roussel, presque »
Philippe G. Kerbellec
[p. 138]
• Europe, n° 1104, avril 2021, 370 p. [20 €]
Une félicité qui est peut-être un autre nom de la gloire : de fait, dans l’imaginaire rousselien, la gloire apparaît moins comme un effet de la réussite de l’œuvre que comme une substance, lumière ou fluide émanant d’un sujet sans failles, dont ce rayonnement atteste la plénitude. C’est pourquoi l’expérience, cruelle, de son irréalité sociale a son lieu dans le corps même de l’auteur : lorsque, à l’été de 1897, personne ne soulève son chapeau pour saluer le jeune auteur de la Doublure et de « Mon âme ». […]
Quand la Doublure parut, le 10 juin 1897, son insuccès me causa un choc d’un violence terrible. J’eus l’impression d’être précipité jusqu’à terre du haut d’un prodigieux sommet de gloire. La secousse alla jusqu’à provoquer chez moi une sorte de maladie de peau qui se traduisit par une rougeur de tout le corps, et ma mère me fit examiner par notre médecin, croyant que j’avais la rougeole.
« Le style substantif de Raymond Roussel »
Christelle Reggiani
[p. 32]
jeudi 1 avril 2021
— Chat ou café ?
Félix Vallotton, 1896
dimanche 20 décembre 2020
samedi 4 janvier 2020
Un cas inca
dimanche 29 avril 2018
en couple
« Madame rêve »
jeudi 23 mars 2017
V
jeudi 12 janvier 2017
trépied
lundi 4 janvier 2016
[ de Montparnasse ]
dimanche 10 août 2014
la rencontre fortuite sur une table de dissection
lundi 5 mai 2014
dimanche 20 janvier 2013
samedi 29 septembre 2012
stein
Wovon man nicht sprechen kann, darüber muß man schweigen.
jeudi 22 décembre 2011
mercredi 25 mai 2011
lundi 14 février 2011
étant donnés :
mercredi 29 décembre 2010
tourtereaux de l’année
vendredi 1 octobre 2010
« — Et vous ! vous, qu’est-ce que vous faites ? »
« — Oh, tu sais ! Moi…, dit Chick, en dehors de Jean-Sol Partre, je ne lis pas grand-chose. »
L’Écume des jours (1947), Boris Vian