Peut-être écrit-on pour s’entraîner à la disparition — tant pis si le rapport paraît choquant —, s'entraîner : lutter contre. Puisque nous n'avons plus rien à dire, plus rien à décrire depuis que le réalisme fuit par tous les bouts, que nous reste-t-il à part le rien ? La situation n'est pas désespérée : on peut faire tant de choses à partir de rien — le rien interdit seulement qu'on les prenne pour le tout. Ainsi, la place est nette, et elle le demeure. Pas question de s’exprimer — exprimer quoi ? Mais l’on peut créer, c’est-à-dire jouer. Il faut d'abord se souvenir un peu pour nourrir le mouvement des mots et rencontrer l'histoire, puis l’on devient guignol ou l’autre ou soi-même, et tout cela sous son nom, à condition de prendre ce SOUS très littéralement.
« L’outrage aux mots »
13/20 février 1975
Jean-Jacques Pauvert, 192 p., 1975
[p. 183-184]
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