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Un livre aux pages entièrement blanches, intitulé What Every Man Thinks About Apart From Sex (« À quoi pense un homme en dehors du sexe ») et publié par l’écrivain et « performeur » Sheridan Simove, en 2011, est devenu en quelques semaines un best-seller, passant à la 744e place des ventes sur le site Amazon. Les étudiants anglais l’achètent notamment pour l’utiliser comme un carnet de notes au design humoristique.
Son pendant, What Every Woman Thinks About Apart From Money (« À quoi pensent les femmes en dehors de l’argent), a été mis en vente par Melissa Marshall en 2013.
Les Miscellanées d’un bouquineur
Virgile Stark
Les Belles Lettres, 2022
Cette « perception subite du vrai », l’érotisme des grenouilles manifesté dans la langue, est ce qui provoque cette perplexité tant recherchée par Duchamp.
L’érotisme n’est-il pas ce qui fait surgir l’autre autre ? Et, surtout, ce qui fait se révéler soi-même autre, bovaryque, double d’une image auparavant insoupçonnée dans une société qui négocie péniblement avec les apparences.
De l’érotisme, Marcel Duchamp affirme qu’il est dans son œuvre « énorme, visible [qui peut être perçu], ou voyant [qui attire le regard/visionnaire ?], ou en tout cas sous-jacent ». Chaque adjectif compte : Duchamp et Rrose Sélavy ne se soucient-ils pas constamment d’optique de précision ?
Et le regardeur, itou.
Marc Décimo
Étant donné Marcel Duchamp, Palimpseste d’une œuvre
Les Presses du réel, 2022 (p. 41-42)
https://www.sitaudis.fr/Parutions/marc-decimo-etant-donne-marcel-duchamp-1668919357.php
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Sylvain Bourmeau interroge Georges Didi-Huberman pour la série « Dans la bibliothèque de… »
AOC, samedi 19 novembre 2022, première question
ligne 3 (réponse) : au lieu de l’abbé Barbeau, lire Aby Warburg ;
ligne 5 : au lieu de Barbeau, lire Warburg.
[...]
Les numéros 1 à 79 du Bulletin sont disponibles en accès libre pour consultation et téléchargement sur
https://www.associationgeorgesperec.fr/
(Vielen Dank à Philippe Mouchès, via Marcel Navas,
pour la réalisation du détournement graphique.)
Après
JMG Le Clézio,
Patrick Modiano,
Annie Ernaux,
il se murmure
que Guillaume Musso
commence à croire sérieusement à ses chances.
« Dans ce monde oscillant entre épicurisme et jansénisme, entre le hasard et l’arbitraire, où les êtres comme l’écriture ne tiennent qu’à un fil, au simple changement d’une lettre ou d’un mot, Jean Echenoz agit en pur romancier de la grâce, une grâce qu’il dispense sans compter, dans la double et complète acception esthétique et théologique du terme, la première étant l’image de la seconde, toutes deux réunies en l’infinie fragilité, toujours susceptible d’être remise en jeu, d’un geste souverain. »
« Jean Echenoz et le clinamen », William Marx, in Cahier de L’Herne Jean Echenoz (p. 24)
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https://www.sitaudis.fr/Parutions/cahier-de-l-herne-echenoz-1664029309.php
Mercredi, au débotté, à toute allure, j’extrais Des éclairs (2010) de Jean Echenoz d’un rayon Minuit de ma bibliothèque parce que je vais avoir deux fois trois quarts d’heure de métro à endurer (deux fois par semaine) ; dans cette biographie romanesque, mélancolique beaucoup, de Nikola Tesla, j’y cherche quelque chose ; je le feuillette ; je le relis par morceaux ; le soir au retour, je m’aperçois qu’une « carte publicitaire » (offerte par la librairie L’Arbre à Lettres, février 2006) était glissée entre les pages finales.
Alors je (vous) la scanne : c’est la phrase d’incipit de Ravel.
(Je pense que Patrick Bléron sera ravi de l’anecdote.)
Atti relativi alla morte di Raymond Roussel
(Edizioni Esse, Palerme, 1971)
(« actes » — comme ceux d’un colloque, d’un notaire, de décès ou de naissance… — au sens d’« écrits »)
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Comment l’auteur de La Doublure, né en 1877 et mort en 1933, qui trouva la mort durant la nuit d’une double fête, religieuse et patriotique, dont les initiales sont redoublées — RR, un homme richissime qui voyageait en Rolls Royce —, pouvait-il ne pas retenir l’intérêt d’un auteur sicilien amateur de romans-enquêtes, dont le patronyme est composé d’une syllabe géminée : « Scia-scia » — son nom ainsi sciemment « scié » ?
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« […] En 2017 paraît le recueil du poète Jacques Barbaut, Alice à Zanzibar, contenant 238 limericks, dont 12 traduits. Il est agrémenté d’un court historique en postface, et d’un index des noms propres allant de "Adam" à "Zazie", car les poèmes suivent l’ordre alphabétique de ces noms. C’est, de loin, le recueil le plus nombreux, le plus imaginatif de tous ceux que nous avons passés en revue, et ses poèmes, dont la chute est toujours grivoise, peuvent être très hard, mais toujours à bon escient. Comme il cherche plutôt à décrire ses fantasmes le plus crûment possible, l’auteur s’abstient de jouer sur les équivoques. […] »
Alain Chevrier, 68+1 limericks
suivi de « Petite histoire du limerick français »
L’Éthernité, 2022
(p. 218-219)
sur
Jean-Jacques Duboys (17 octobre 1768-18 juillet 1845),
de la série des « Parlementaires », par Daumier
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« La France lui doit deux des plus grandes choses de notre époque :
1. substitution du mot pourra au mot devra dans la loi sur la pêche à la morue ;
2. introduction d’une virgule dans un article de la loi sur les cassonades. »
Le Charivari
J’ai inventé mon propre métier, unique et original : « fabricant de boules et de textes sur les yeux » ou « imprimeur de ma propre matière et de ma propre pensée ». Et avec ce seul métier, j’ai l’impression d’avoir exercé tous les métiers du monde. Si on laissait à chaque homme la liberté d’inventer son propre métier, il n’y aurait plus de pauvres sur la terre. Chacun serait en mesure de créer sa propre monnaie d’échange, et enfin son propre univers.
Jean-Luc Parant
(1944-2022)
Où et comment j’ai retrouvé Alice à Zanzibar...
L’amour avec un grand a
L’histoire avec sa grande hache
La science avec sa grande scie
La botanique avec des grandes bottes
La folie avec sa grande faux
La criminalité avec ses grands cris
Le complotisme avec le grand con
Le négationnisme avec son faux nez
La créativité avec une grande craie
La marine avec son grand mât
La roulotte avec ses grandes roues
Le souverain avec ses gros sous
Sylvie avec ses grands cils
La pharmacie avec ses grands fards
La littérature avec son grand lit
La poésie avec sa grande peau
La culture avec son grand cul
La pornographie avec son gros porc
La loterie avec son gros lot
La morale avec ses grands mots
La révolution avec son grand rêve
L’ichtyologie avec son grand Ich
« La première phrase d’un livre soutient la dernière, toujours. Et elles entretiennent un rapport étroit l’une avec l’autre, même s’il s’agit d’un rapport de fuite, de précarité ou de tangence. L’économie se tient dans la main inventée du lecteur qui cherche la main inventée de qui écrit. Ces deux mains doivent se serrer, d’une façon ou d’une autre. »
Jean-Patrice Courtois
Langage et document
Zoème, 2022 (p. 58-59)
« Dans ses lettres de jeunesse, Mallarmé saluait de sa main, qu’il offrait, donnait, envoyait. Il serrait celle de ses correspondants. Votre main, écrit-il, avant de signer. Il est cette main qu’il tend à son destinataire, il est cette main qui écrit sur la voile blanche de son embarcation. »
Sally Bonn
Écrire écrire écrire
Arléa, 2022 (p. 171)
On ne dit pas « je sue » mais « je transpire » ; une jeune fille bien élevée dira simplement « j’ai chaud ».
J’ai lu Guerre* pendant les vacances.
et non
Je n’ai guère lu pendant les vacances.
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* « Je la regardais moi la vie, presque en train de me torturer. Quand elle me fera l’agonie pour de bon, je lui cracherai dans la gueule comme ça. Elle est tout con à partir d’un certain moment, faut pas me bluffer, je la connais bien. Je l’ai vue. On se retrouvera. On a un compte ensemble. Je l’emmerde. »
« Nous avons longtemps rêvé, Michel [Chandeigne] et moi, d’une toute petite librairie où l’on ne vendrait que les douze ou quinze titres sans lesquels, à nos yeux, le monde s’effondrerait. On y aurait trouvé aussi d’excellents single malt écossais et quelques vénérables portos. Nous imaginions une rue peu passante et des Chesterfield patinés. Total échec, donc. »
Marcel Cohen
Libération, « Livres », jeudi 19 mars 2015
Ce soir-là, l’homme avait raconté à son amie l’histoire d’Abdul Kassem Isma’ail, grand vizir de Perse qui, au Xe siècle, ne pouvait se résoudre à se séparer de ses cent dix-sept mille volumes. Il les faisait transporter par une caravane de quatre cents chameaux. Les animaux étaient dressés à marcher par ordre alphabétique.
Marcel Cohen
L’homme qui avait peur des livres
J’ai porté des statues sur le bateau.
Leur immense visage est anonyme.
J’ai porté des statues sur le bateau
afin qu’elles restent debout sur l’île.
Du lobe de l’oreille à l’aile du nez
s’ouvre un angle de quatre-vingt-dix degrés.
Sauf cela, aucun signe, rien de rien.
J’ai porté des statues sur le bateau.
C’est ainsi que j’ai sombré corps et biens.
traduit du hongrois par Isabelle Vital
adaptation de Pierre della Faille
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De ces statues que j’escortais,
nul nom ne dit le haut visage.
En mon vaisseau les escortais
jusqu’à l’île en dresser l’image.
L’angle pris du tragus au nez
avait quatre-vingt-dix degrés,
hors cela rien à signaler.
Ces statues je les escortais,
et ainsi j’ai sombré.
adaptation de Guy de Bosschère
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J’ai porté des statues jusque sur un bateau
leurs visages sans nom étaient démesurés
J’ai porté des statues jusque sur un bateau
Je les voulais debout fichées au cœur de l’île.
Toutes pareilles
avec la conque de l’oreille
leur nez faisait un angle droit
pas d’autre signe distinctif
J’ai porté des statues jusque sur le bateau
et voilà pourquoi j’ai sombré.
adaptation de Bernard Noël
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in Ágnes Nemes Nagy
Les Chevaux et les Anges
« anthologie poétique 1931-1991 »
établie sous la direction d’Anna Tüskés
avec le concours de Guillaume Métayer
La Rumeur libre éditions, coll. « Centrale/Poésie »
2022, 288 p., 18 €
[pages 89-91]
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Après avoir rejeté Spicilège, puis Reliquat, ainsi qu’Happylogue, cherchant un nouveau titre pour poursuivre (achever ?) sa série inaugurée par Bardadrac — « mot-chimère jadis inventé par l’une de mes amies pour désigner le fouillis de son grand sac à main » —, Gérard Genette (le constant intitulauteur de Figures, I, II, III, IV et V) écrit (Postscript, 2016, p. 12) :
« Je perçois bien qu’après Codicille, Apostille et Épilogue, je peux sembler vouloir saturer l’ensemble d’un champ lexical voué à ce que Montaigne, on le sait déjà, appelait plus familièrement des “ allongeails ”. »
Bardadrac
Codicille
Apostille
Épilogue
Postscript