dimanche 29 mars 2020

papyrornithologie

Cocotologie se compose du mot français cocotte, « petit oiseau en papier », et du mot grec logie, de logos, « discours ». En français, la cocotte appartient au langage des enfants ; au sens propre et direct, le mot s’applique à la volaille et, par extension, à tous les oiseaux ; au sens métaphorique, il s’applique aux cocottes en papier et aux filles de joie. Ici, je devrai développer une comparaison entre les filles de joie et les cocottes, fragiles par nature les unes et les autres.


Observez la perfection avec laquelle la cocotte pose ses pieds à terre et se tient debout ; remarquez qu’elle entretient le moins de contact possible avec le sol et ne le touche que sur les trois points nécessaires pour se maintenir en équilibre stable ; dites-moi s’il ne s’agit pas là d’une nouvelle et mirifique perfection de son être, une perfection qui l’élève au-dessus de tant de plantigrades humains qui ont besoin de toucher le sol autant qu’ils le peuvent couvrir. La cocotte est un être tripode, et la cocotte parfaite, la cocotte archétype ou idéale, ne devra toucher le sol que sur trois points géométriques, trois points purs, déterminants, d’un plan rigoureux. 


Chez le mâle parfait (comme le montre la fig. 4), la pomme d’Adam forme une protubérance triangulaire dont l’extrémité se situe aux trois quarts de la ligne qui va de la pointe du pied à celle du bec. De cette pointe, une autre ligne va jusqu’à la moitié du cou. En revanche, chez la femelle parfaite (fig. 3) apparaît une gorge trapézoïdale dont l’angle libre, également situé aux trois quarts de la ligne susnommée, trace une ligne vers le sommet de la tête. On voit donc que chez le mâle, c’est le cou qui commande la pomme d’Adam, tandis que chez la femelle c’est le sommet de la tête qui commande la gorge d’Eve. Je laisse aux mystiques et aux humoristes − qui ne sont qu’un − le soin de passer au crible, ordonner, perquisitionner et réquisitionner ce symbolisme. Le sérieux notoire de la recherche scientifique ne me permet pas de me laisser distraire par cela.


Il va sans dire qu’aucun être studieux ne se contentera de méditer sur ces figures, il doit prendre un papier, le plier et faire, comme dans un séminaire ou un laboratoire de recherche scientifique, sa propre expérience, car le pire pour la science serait d’être réduite à un exercice de mémoire ou de littérature.


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Miguel de Unanumo (1864-1936), Apuntes para un tratado de cocotología

La Cocotologie. Notes pour un traité, traduit de l’espagnol par Emma H. Clouard, Ed. Self, 1946
Traité de cocotologie, trad. Sylvie Coudel, présenté par Fernando Arrabal, Ed. de Paris, 1994



2 commentaires:

Coco a dit…

Cocoïncidence !

Am Lepiq (monsieuye) a dit…

Coco ainsi danse...