mercredi 27 décembre 2017

Enc(o)re mieux qu'à Noël


Peut-on donc dire que l’on a affaire ici à de la poésie ? Quelle que soit la réponse donnée à cette question, le livre s’ouvre sur une citation de Léo Ferré qui souligne une évidence trop souvent oubliée dans la tribu des poètes : toute ségrégation lexicale (dans un sens ou dans un autre) n’a rien à voir avec ce qui fait d’un texte un poème – il suffit de (re)lire Villon, par exemple, pour illustrer cela. Même si dans la plupart de ces 238 quintils l’auteur appelle une chatte une chatte, cette dominante érotique ou pornographique (chacun en décidera, conformément à la fameuse formule dont l’origine est discutée  : « la pornographie, c’est l’érotisme des autres ») ne l’empêche pas de traverser les lexiques les plus divers en évoquant des sphères culturelles qui vont de Betty Boop à Magritte, en passant par de nombreux écrivains : Hugo Ball, Sade, Kafka, Dante, Pierre Louÿs, Kerouac, Mallarmé, Poe, Sagan, Foucault, etc.

Bruno Fern

(26 décembre 2017)



(co)dirigé par Fabrice Thumerel


vendredi 15 décembre 2017

limerick 77

Cette poétesse née à Halifax
Ne s’encombre guère de la syntaxe
Pour confectionner de forts limericks
Elle y glisse des rimes en X
+ 1 époustouflant hapax.

in



jeudi 14 décembre 2017

7 7

Hasard heureux, ou préméditation de Mallarmé : cette dialectisation du Nombre via son autonégation se laisse entendre dans le nom même du Nombre : « Sept cent Sept » comme «  Sept sans Sept ». 
La suite se comprend d’elle-même : « Se chiffrât-il / évidence de la somme pour peu qu’une / Illuminât-il » : le Nombre serait chiffré (id est : décodé et rapporté au chiffre 7 qui en est la clef), pour peu que le lecteur ait simplement l’idée de faire exister cette « somme » en effet évidente qu’est l’addition des mots.

C’est alors qu’il illumine. 



Quentin Meillassoux
Le Nombre et la sirène
« Un déchiffrage du Coup de dés de Mallarmé »
Fayard, collection « Ouvertures » 

(cit. p. 77)

mercredi 13 décembre 2017

du verbe « limeriquer »

Il fallait que la mémoire de Luc Etienne soit célébrée. Jacques Barbaut s’y emploie, qui reprend le flambeau, en signant à son tour de splendides « à-peu-près phonétiques » avec une euphorie contagieuse. A le lire, on se prend au jeu. C’est une poésie transmissible, porteuse de mots qui donnent la fièvre. Dans la postface de son ouvrage, toute remplie de citations jouissives, Jacques Barbaut compare cette magie à celle des murs de pissotières où les dessins laissés par des inconnus suscitent l’inspiration de visiteurs qui y rajoutent des détails ou des commentaires : le graffiti vire au cadavre exquis. 

Agnès Giard
« Les 400 Culs »




mardi 12 décembre 2017

dessus-dessous


in



Alain Frontier, Erudition, « 7 lectures commentées »
éditions Louise Bottu, novembre 2017, 168 pages, 14 €


dimanche 10 décembre 2017

limerick 96



https://www.aethalides.com


L’art « mineur » l’est-il parce qu’il est puéril ? Barbaut prend (et donne) un plaisir enfantin à « limeriquer » une « jeune fille du Massachusetts » capable « de pisser sur la table / Et de sécher sa chatte avec ses chaussettes ». Peut-être aussi parce qu’il est artisanal. « Solidarité sainte de l’artisanat », dirait Brassens, entre Barbaut et ses éditeurs, qui partagent son soin diabolique du détail. On goûtera le même perfectionnisme dans les vidéos, visibles sur Youtube, où le « limeriqueur » fait plus court que « La Minute nécessaire de Monsieur Cyclopède ». Mais ni moins culotté, ni moins savoureux.
François Huglo
Sitaudis (7 déc. 2017)

samedi 9 décembre 2017

Une attente


Jeu : prendre le premier chapitre de Aventures de trois Russes et de trois Anglais dans l’Afrique australe, de Jules Verne, en extraire plusieurs phrases afin qu’elles correspondent à une thématique obsessionnelle, à savoir la série sur Le Fleuve. Ne se permettre que de rares mots de liaison, élaguer quand nécessaire, mais garder la succession des phrases à partir du texte original. En faire une courte nouvelle du Fleuve dont Verne sera l’auteur et Yves Letort le soutier.


Yves Letort (d’après Jules Verne)
Granit House, 2017, 16 pages, jaquette avec rabats

(À vingt exemplaires pour les lecteurs du Fleuve.)

vendredi 8 décembre 2017

Ceci n’est pas un limerick

Ce fils de banquier Raymond Roussel
Fut (incontestablement) le père spirituel
Du marchand de sel
Duchamp Marcel
Autre immortel.

jeudi 7 décembre 2017

un limerick de William H. Gass

J’ai couché un jour avec une nonne 
Qui avait tout d’une garçonne :
Pas un seul poil sur le caillou
Et quant à ce qui était dessous :
Bim bam bom bim bam badabom.

Un bifton de dix à qui trouvera mieux que mon dernier vers, claironne Culp.


Le Tunnel (The Tunnel)
William H. Gass
Traduit de l’américain par Claro
Le Cherche Midi, coll. « Lot 49 », 2007
(720 pages, cit. p. 320) 



Après l’académicien et « l’idole des jeunes »
Ce fut William H. Gass, cette nuit dernière, à l’âge de 93 ans,


annonça ce matin Claro, en son Clavier cannibale, qui est son blog, lequel vient de fêter ses dix ans d’existence.

Echo & Co

Quand sur Sitaudis
François se déclare fan d’Alice
Au fin lettré Huglo
Le limerickeur Barbaut
Assure : « C’est un délice ! »

dimanche 3 décembre 2017

pour un centenaire

Je m’aperçois seulement ce soir que Gershon Legman — né le 2 novembre 1917 en Pennsylvanie (E.-U.) —, qui fut très exactement à l’origine de la conception d’Alice à Zanzibar, aurait pu cette année fêter ses cent ans.

Au début de l’année 2008, approximativement, sur un banc public situé devant le 17 de l’avenue Corentin-Cariou, quartier de la Villette, dans le XIXe arrondissement de Paris, je découvris un fort exemplaire relié (hard cover), abandonné parmi d’autres, la plupart en anglais, que je décidai, après feuilletage express — ou humer l’air des pages — d’emporter : sans doute la vue immédiate de ces blocs de cinq vers se succédant me suggéra aussitôt une poésie que je subodorais vaguement d’humeur joueuse, voire licencieuse.

(premier paragraphe de la postface, « Du limerick », d’Alice à Zanzibar)





exemplaire trouvé
1969, épais volume de 598 pages

(bords jaquette abîmés)

samedi 2 décembre 2017

Lune

piafs et chats rou- 
pillent à leur place
sur les terrasses

des altocumulus
courent cotonneux
à leur tiède hiver
-nale habitude

à la sienne un clodo 
pionce ferme
contre le rideau
de fer d’une boutique

tout près des expats
mal triés boivent
braillent dans un bar 
leurs dollars

l’ombre de la terre
a éclipsé deux 
tiers de pleine lune



Jacques Demarcq
Phnom Poèmes
(documentaire)
NOUS, 2017
120 pages richement illustrées, 15 €
(bicolore, format carré, carnet de voyages)

(cit. p. 25)